20e anniversaire des Trinômes académiques d’Île de France


Paris, École militaire, mercredi 26 novembre 2008. Transcription des interventions.

Introduction

Trinôme académique : rapprochement de trois institutions, le ministère de l’Éducation nationale, le ministère de la Défense et l’Institut des Hautes Études de la Défense Nationale (IHEDN), dix ans avant la suspension du service national. Ambition : information par des rencontres et des possibilités de contacts particulièrement fructueux.

1 – Recteur de l’académie de Paris, Maurice Quénet

Trinômes Défense/Éducation : deux mondes qui, il y a 20 ans, s’ignoraient, mais se fréquentaient à l’occasion du service national. Aujourd’hui, le partenariat des académies de Versailles, Créteil et Paris a porté ses fruits. Cette commémoration permet de se tourner vers l’avenir pour faire le point sur les tendances de la politique de Défense et de Sécurité pour l’Europe. Les thèmes de réflexion correspondent aux enjeux du Livre Blanc sur la Défense et la Sécurité nationale, avec les enseignants, les officiers, les experts en matière de Défense et de Sécurité… Notamment quant aux politiques à mettre en œuvre pour renforcer encore la dimension européenne de notre politique de Défense et de Sécurité, compte tenu des nouvelles menaces et des nouveaux risques, plus difficiles à identifier et à percevoir.

Par rapport aux années passées, trop peu a été fait dans le cadre de la formation initiale. De ce point de vue, il reste beaucoup à imaginer, à organiser, à réaliser. Depuis la suspension du service national, l’Education nationale a donc eu une responsabilité première dans la formation des jeunes français, aux voies et aux moyens engagés par la Nation, pour répondre aux nouveaux défis de sa sécurité et de la paix dans le monde.

La loi du 28 octobre 1997 à instauré un parcours citoyen pour renforcer le lien Armée/Nation et à sensibiliser les jeunes aux enjeux de notre Défense. Un enseignement obligatoire a été mis en place, portant sur les principes et l’organisation de la défense nationale et européenne, dans le cadre des programmes des établissements d’enseignement du second degré. C’est un devoir moral, plus qu’une obligation qui reçoit la souplesse que l’on est en train de perdre pour l’éducation civique et le rappel des principes moraux.

Des progrès sont à faire, notamment à Paris, en matière de JAPD. La fin de la guerre froide, la mondialisation, la coopération européenne, les menaces terroristes, le déplacement et la régionalisation des conflits, rendent l’enseignement de la Défense plus complexe, plus délicat, plus diffus, plus difficile à cerner.

Pour le jeune, le fait de vivre en Europe, le continent de la paix, paix relative, a certainement amoindri le sens et le concept de Défense. La paix parait naturelle à nos enfants. Mais, nous ne sommes pas à l’abri de tout conflit. C’est une idée erronée, illusoire. Aujourd’hui, nous voyons que nous ne sommes pas à l’abri d’une absence de croissance. L’école doit avoir pour mission de rétablir cette évidence, en posant des enjeux réels. L’école apprend la Défense. C’est une nécessité impérieuse, car la paix n’est jamais définitivement acquise pour des élèves qui sont des citoyens, acteurs de la Défense de leur pays.

Le concept de citoyenneté doit être un bloc. Comme la population est de plus en plus diversifiée en Île-de-France, les élèves ont tendance à se considérer comme des citoyens du monde. Encore faut-il expliquer ce qu’est la citoyenneté. Le patriotisme cocardier n’est plus de mise.

Le concept revisité de citoyenneté, fait de droits et de devoirs, est perfectible, si on se donne la peine de le développer. Il faut dépasser une vision simpliste, voire déformée, de la Défense nationale et de l’armée, pour une prise de conscience que la citoyenneté est aujourd’hui l’identification à des valeurs communes. Dans notre démocratie, la Défense est un devoir pour tous, cette adhésion citoyenne doit être favorisée, car c’est un élément essentiel de notre pacte républicain.

Dans l’Éducation nationale, si c’est dans le programme, c’est suivi. C’est le projet pédagogique. En dehors de la défense du territoire national, l’armée défend les droits de l’homme, une certaine conception de la civilisation, protège les minorités dans un cadre international, agit contre le développement du terrorisme et assure des opérations à caractère humanitaire.

Son rôle est irremplaçable et, il faut le dire à nos élèves, le temps de l’antimilitarisme envers les armées est révolu. Aujourd’hui, le grand danger, c’est l’indifférence. C’est la spécialisation, le cloisonnement des tâches, militaires, pompiers, infirmiers, douaniers…, qui est le danger. Nous devons mieux cerner, en nous projetant vers l’avenir, les types d’actions nécessaires au renforcement de l’enseignement de l’organisation de la Défense et de la Sécurité.

La transmission des valeurs communes et moins assurée qu’hier. Avant-hier, tous nos concitoyens étaient prêts à mourir pour la patrie. La paix, entièrement rétablie sur le continent européen a entièrement transformé la donne. La fin du service militaire obligatoire et l’importance des victimes civiles dans les conflits du XXe siècle a rendu ce sentiment de sacrifices moins prégnant, moins immédiat.

Notre Défense repose sur le courage d’hommes et de femmes libres dans une éthique de responsabilité. L’Éducation nationale est chargée de former des hommes et des responsables, libres de leur choix pour l’avenir. Sinon, nous serons une société d’assistés, ce qui serait le pire. Les jeunes souhaitent s’engager. Ils veulent servir des causes élevées. À nous de savoir répondre à leurs sollicitations et ainsi, nous aurons un esprit de Défense qui sera naturel, comme le droit à l’éducation, le droit à la liberté.

2 – Recteur de l’académie de Créteil, Jean-Michel Blanquer

Le Trinôme académique a été renouvelé en 2007 par le ministre de l’Éducation nationale, Gilles de Robien, par un protocole d’accord avec le ministre de la Défense. Il nous faut faire le bilan d’un état d’esprit et en même temps des actions pratiques, des éléments concrets dans les écoles, lycées et collèges qui font vivre un tel protocole.

Le contexte historique : la loi du 28 octobre 1997. Elle a suspendu le service national et a confié à l’Éducation nationale la mission de former les jeunes citoyens aux principes de notre Défense. La loi d’orientation et de programmation de 2005, pour l’avenir de l’école, indique de faire partager aux élèves les valeurs de la République.

Le Trinôme académique et donc au centre même des activités de l’école. La loi indique aussi de garantir à chaque élève les moyens nécessaires à l’acquisition d’un socle commun de connaissances et de compétences. Or, ce socle commun, défini en 2006, dit que la Défense est précisément une des connaissances que tout élève doit avoir acquise à la fin de la scolarité obligatoire, au titre de la culture humaniste, des compétences sociales et civiques et du développement de l’autonomie et de l’initiative. Elles sont donc bien au centre de nos activités pédagogiques et éducatives.

Cette action se traduit par plusieurs aspects.

D’abord, le parcours de citoyenneté. L’approfondissement de l’enseignement de la Défense commence par l’instruction civique à l’école primaire. Elle se traduit par l’enseignement des symboles de la République. Cet enseignement est primordial pour souder les élèves dans l’appartenance à une Nation. C’est La Marseillaise en CM1. Son apprentissage doit se faire en restant éloigné d’un chauvinisme cocardier, afin que, même s’il existe une grande diversité, les élèves doivent sentir qu’ils appartiennent à un même pays.

Après l’apprentissage des symboles dans le primaire, l’éducation se prolonge de façon plus substantielle dans le secondaire. Au collège, il est important, en 5°, de faire apprendre la défense civile et les risques majeurs, les questions de sécurité du territoire. En classe de 3°, le programme d’histoire se prête particulièrement à cette sensibilisation, puisque les deux conflits mondiaux sont traités, ainsi que le monde depuis 1945. On fait référence aux interférences entre l’apprentissage de ces questions et la sensibilisation à l’instruction civique. Il faut faire attention à l’efficacité des interventions des professeurs à ces niveaux d’enseignement.

L’éducation civique se poursuite au lycée, avec les notions obligatoires de nationalité, de droits politiques, de pouvoir, de démocratie, de République, de liberté, de l’intérêt général, de la souveraineté, de la sécurité… Tout cela traverse de nombreuses disciplines dans notre système d’enseignement.

Cet enseignement peut être associé à d’autres actions facultatives qui se sont multipliés dans nos académies : la découverte du patrimoine culturel des armées, les lieux de mémoire… Des projets pédagogiques concernent des pratiques sportives avec des échanges entre élèves et militaires, la participation des comités de vie lycéenne à des opérations conduites par le ministère de la Défense, comme la Sécurité routière, des forums, des Journées Portes Ouvertes sur la Défense, l’expérimentation des livrets d’engagement civique au lycée, l’accomplissement du parcours de citoyenneté, le recensement, la participation à la JAPD et la présence aux commémorations nationales avec l’aide des professeurs. Ces nombreuses actions de Défense ont souvent menées avec des financements de la DMPA et la Fondation Maginot, qui doivent être ici remerciées.

Il y a aussi des actions pour la visite des lieux de mémoire ou la participation à des concours, notamment le Concours national de la Résistance et de la Déportation. Nous sommes attentifs à la participation des écoles aux commémorations, celles du 8 mai 1945 et du 11 novembre 1918, en particulier. Elles prennent un sens tout à fait différent si les enfants y sont associés, notamment avec la participation des chorales des écoles.

Tout ceci passe par la formation des enseignants et des cadres de l’Éducation nationale, des responsables des IUFM, en particulier. L’intervention d’officiers et d’universitaires dans le cadre des IUFM est essentielle, à travers la formation initiale des enseignants. Il s présentent le Livre Blanc de la Défense, la Défense européenne, les différentes menaces dans le monde, en faisant appel à des spécialistes qui intéressent les enseignants, non seulement ceux d’Histoire et de Géographie, mais aussi ceux d’autres disciplines. Il y a aussi les actions de formation continue et les formations à une culture de la Défense pour les cadres de l’Éducation nationale. Il existe des supports d’accompagne-ment pour l’enseignement de la Défense, des documents pédagogiques, des sites Web.

Cet approfondissement est bien lancé. Il faut aller plus loin : améliorer le recensement de l’ensemble des jeunes filles et des jeunes garçons à l’âge de 16 ans, une démarche volontaire à accomplir par les jeunes citoyens à la mairie. L’Éducation nationale se charge d’informer les jeunes de cette obligation. Il est utile d’avoir une communication plus active à ce sujet, en utilisant le carnet de correspondance, les logiciels de gestion des élèves. Une meilleure articulation est recherchée entre l’enseignement de Défense et l’Appel de Préparation à la Défense, la JAPD. Elle parachève l’enseignement reçu à l’école. Des JAPD peuvent être réalisées dans les lycées généraux et les lycées professionnels, avec l’aide de professeurs volontaires, pour préparer la journée et s’engager à d’autres actions.

Enfin, l’insertion et l’emploi font aussi partie de notre partenariat par l’information, la formation et l’orientation professionnelle, avec des sessions-jeunes à l’IHEDN, des Journées Portes Ouvertes et l’accueil de collégiens en découverte professionnelle. Des Forums des métiers sont organisés par les Armées. Ces journées des métiers dans les établissements peuvent être le prétexte à la présence des militaires.

La promotion de l’égalité des chances fait également partie de ce partenariat avec l’Éducation nationale. Elle a pour vocation de transmettre la connaissance, suppose de connaître la société dans laquelle nous vivons. Dans cette société, la notion de Défense fait partie des enjeux importants. C’est un thème transversal à nos activités pédagogiques de transmission du savoir et à nos activités éducatives. Loin des images du passé, qui parfois sont des freins pour faire passer les principes de vie d’un pays, il faut les faire vivre et, pour les entretenir, il faut un état d’esprit.

3 – Recteur de l’académie de Versailles, Alain Boissinot

Les relations entre le monde de l’Éducation nationale et celui de la Défense sont importantes et profondes. Elles enrichissent la communauté de valeurs entre nous. Depuis des siècles d’histoire, l’armée d’un côté, les systèmes d’éducation de l’autre, ont été conçus comme les piliers de la Nation française.

Ces deux institutions partagent des expériences assez proches et notamment celles d’être confrontés à un monde en changement rapide et donc à la nécessité d’évoluer de façon très profonde. L’Armée s’est profondément transformée depuis une dizaine d’années, avec la suspension du service militaire obligatoire. L’Éducation nationale se transforme aussi sur un rythme accéléré.

Il faut confronter nos expériences et rapprocher nos points de vue, ce qui est enrichissant. Et nous avons, vis-à-vis des jeunes, des responsabilités particulières. Notre ambition est de faire en sorte que notre travail en matière d’éducation de la Défense ne se résume pas à une obligation supplémentaire, se rapportant à d’autres, mais s’inscrivant dans la profondeur et la durée.

Profondeur. L’éducation à la Défense doit irriguer l’ensemble des enseignements et ne doit pas être un sujet de plus. Les enseignants sont sollicitées au fur et à mesure que la société française découvre des enjeux nouveaux, avec des thèmes et des obligations supplémentaires, d’où un effet d’éparpillement. L’enseignement de la Défense fait partie du socle commun de compétences au terme de la scolarité obligatoire. L’ambition d’une culture humaniste moderne fait toute sa part à l’enseignement de la Défense. Cela suppose que l’ensemble des disciplines reçoive cette contribution au-delà de l’implication première des historiens- géographe, mais à l’ensemble des équipes pédagogiques, des collègues de toutes spécialités, dont les rôles sont complémentaires : lettres, mathématiques, technologie, documentalistes…

Durée. Pour travailler dans la durée, il faut que nous puissions inscrire notre préoccupation de l’éducation à la Défense dans la diversité des territoires académiques. C’est le rôle des Relais-Défense d’Établissement, mis en place avec un succès prometteur. C’est grâce à eux, au jour le jour, dans la pratique quotidienne, que la volonté qui est la nôtre, les ambitions qui sont les nôtres, sont relayées. Les Relais-Défense d’Établissement vivent quotidiennement des initiatives comme la visite de bases militaires, de musées, l’organisation de rencontres entre élèves et militaires, l’organisation de Journées Portes Ouvertes, de travaux pratiques. Ces Relais sont les moyens de sensibiliser tous les enseignants, afin d’apporter des moyens matériels et des éléments de réflexion nécessaire pour donner tout son sens au projet d’éducation à la Défense. L’écho rencontré prouve que nos préoccupations sont bien perçues comme étant essentielles, inscrites en profondeur dans les projets d’établissement et durables.

4 – Gouverneur militaire de Paris, le général Bruno Dary

Quel changement quand je pense à mes années d’élève officier à Saint-Cyr, il y a 35 ans. Quelle satisfaction, lorsque les DMD m’invitent à de telles réunions pour témoigner. Ce changement, nous le devons à l’évolution des mentalités. Nous le devons aussi, à un homme, Charles Hernu, qui a su réconcilier les choses de la Défense, avec une partie de l’électorat. On le doit eux aussi à la dissuasion nucléaire où l’intérêt de la France ne s’arrête pas aux frontières. Et plus récemment, avec la notion un peu ambiguë, de soldats de la Paix. Nous le devons aussi à tous les cadres qui ont assuré le service national avec un comportement exemplaire. Ils ont su montrer les vertus de l’exemple, élément pédagogique essentiel. Car, comme les dirigeants des entreprises, il suffit que l’un ne se comporte pas bien, pour que l’ensemble de la classe soit mal jugé.

Le premier bouleversement majeur, c’est la suspension du service national, bien réussi sur le plan militaire, mais moins bien sur le plan social. Comme il n’y a que 20 000 engagés dans l’armée, les familles étant ce qu’elles sont, les enseignants ont un devoir et une responsabilité immense. Nous avons besoin de vous, d’abord pour l’instruction, les connaissances, base de la liberté. Car celui qui ne connaît pas, ne sais pas où il va et, au moment des choix, il suit la mode. Celui qui n’a pas de connaissances, voit passer le développement devant lui et il reste sur le quai de la gare avec, comme conséquence, la marginalisation.

Donc, nous avons besoin de vous pour l’éducation de cette jeunesse, du fait de la grande disparité dans les familles. Il y en a encore qui donnent le sens du travail, le sens de la formation, de l’éducation. Mais, de plus en plus, on ne parle plus de famille, on parle de « parentèle ».

À ceux qui sont livrés à eux-mêmes, les enseignants apportent un côté « égalisateur » dans le sens positif du terme, pour donner à chacun une sorte d’uniforme, comme était la blouse grise de la République, un côté égalisateur positif, chacun au même niveau peut progresser et, chacun, être apprécié en fonction de ses capacités et de sa bonne volonté.

Les enseignants ont un rôle à jouer sur le plan de la Défense. La loi de 1997 vous a impliqués en créant le parcours citoyen. C’est un rôle pédagogique.

La défense aujourd’hui ne se conçoit plus aux frontières. Un événement majeur, en septembre 1958, a été la poignée de mains entre De Gaulle et Adenauer. C’était une révolution, car pour la première fois depuis plusieurs siècles, la France et l’Allemagne (auparavant la Prusse), se sont rendus compte que les guerres les avait ruinées et qu’il valait mieux travailler ensemble.

À partir de ce jour là, il n’y a plus de menace à nos frontières, en Alsace et en Lorraine. Ensuite, il y a eu la disparition du rideau de fer, signifiant qu’il n’y avait plus de menace, non seulement à nos frontières, mais même au-delà. Mais, inversement, il n’y plus de frontières à la menace. Le terrorisme peut frapper au cœur de Paris, à New-York, à Madrid, à Londres…

Comme la menace n’est plus palpable, il faut aller plus loin. Il faut expliquer qu’un pays ne se résume plus à ses frontières, mais à la totalité de ses intérêts dans le monde. Celui des hommes d’affaires, des ONG, des touristes… dont il faut assurer la sécurité. On le voit aujourd’hui, par exemple, avec la protection des navires marchands ou de plaisance dans le golfe d’Aden, contre le piratage.

La notion de Défense est élargie aux pays de l’Union européenne, à ceux qui ont les mêmes intérêts que nous. Nous voyons que nous pouvons nous unir facilement pour œuvrer ensemble. En revanche, ce qui demande plus de pédagogie, c’est notre rôle dans l’OTAN, parce que cela ne passe pas bien dans l’opinion publique, à propos de l’Afghanistan. Pourquoi, cependant, nous y engager ? Par respect pour les Américains qui nous ont sauvé la mise, lors de la seconde guerre mondiale, pour la défense de nos valeurs.

Valeurs ? Très simplement, la valeur qui fait la fierté de la France, c’est la dignité de l’homme. Cette dignité ne s’arrête pas uniquement aux Droits de l’Homme, mais aussi à ses devoirs, à ses devoirs de citoyen, un devoir de pédagogie continuelle. Pourquoi une Défense ? Si l’on parle souvent du lien Armée-Nation, mieux vaut parler de la place de l’Armée au cœur de la Nation. Parce qu’il s’agit de se battre pour défendre nos valeurs.

« Les raisons de vivre sont autant de raisons de mourir et qui donnent un sens à la vie » (Maréchal de Lattre de Tassigny). En tant que de général Gouverneur de Paris, j’ai la mission d’accueillir la dépouille mortelle de nos camarades qui meurent au combat. Et aussi d’accueillir les épouses, les enfants, la mère. Et là, il faut trouver les mots pour expliquer que l’homme qu’elle pleure n’est pas mort pour rien, que cette épreuve éclaire le sens de l’engagement et la portée de la Défense. On ne risque pas sa vie pour des futilités, mais pour des valeurs que l’on est prêt à défendre.

Je lance trois pistes à l’occasion de cet anniversaire.

Continuer à recruter des Relais-Défense d’Établissement. Ce sont des points d’entrée essentiels pour une respiration commune entre la Défense et les établissements d’enseignement.

En second lieu, vous les professeurs, vous avez la chance de disposer à Paris d’un lieu mythique, mystique, c’est l’Arc de Triomphe. Des professeurs viennent le soir avec leurs classes pour ranimer la flamme à 18h30. Ce lieu fait réfléchir en se disant que le Soldat inconnu, on ne sait pas qui c’est, mais ce dont on est sûr, c’est qu’il s’agissait d’un gamin de vingt ans, qui aurait pu être un frère, un grand frère ou dont on pourrait être la sœur. Ce n’est pas le poilu de 1914, comme ceux dont on garde la mémoire, comme Lazare Ponticelli. Et, un peu plus loin, il y a une plaque sur les Champs-Élysées, en souvenir des étudiants qui, le 11 novembre 1940, sont venu ranimer la flamme, avant d’être arrêtés par les Allemands. Ce geste fort exprime que notre liberté était le prix de leur sacrifice.

Dernier point : il y a un effort de réflexion à l’IHEDN. Il y a pléthore de gens qui font du « lobbying » autour du ministère de la Défense. En revanche, nous avons besoin de gens qui relèvent les manches et tissent des contacts en allant témoigner dans les entreprises, à l’université, dans les écoles. Car de ceux-ci, on en a moins.

L’IHEDN et après ? Réflexion à mener pour ce bon projet. Il faut aller plus loin, vous qui êtes au contact, tous les jours, avec nos élèves, avec nos enfants. C’est une bonne manière de ramener nos stagiaires, nos auditeurs IHEDN à la réalité, les faire témoigner sur ce qu’ils vivent, sur ce qu’ils sont, pourquoi ils ont été amenés à s’engager et à suivre pendant un an une scolarité. Il est bon de montrer que, si leur pragmatisme leur donne des raisons de vivre, leur engagement leur donne également des raisons de mourir. Merci pour votre attention.

5 – Directeur des associations de l’IHEDN, René Occhiminuti

A quoi sert l’IHEDN ? A quoi servent les associations ? La mission de l’IHEDN et de faciliter la relation entre la Défense et les citoyens de ce pays. Elle repose sur deux piliers : un institut de formation et les associations. Celles-ci regroupent ceux qui veulent agir et travailler sur le terrain. Il faut remercier ceux qui agissent sur le terrain dans les Trinômes académique, les inspecteurs d’académie, les DMD et les responsables d’associations.

Ce sont eux qui ont pour objectif d’aider les enseignants à saisir les problèmes de Défense et de Sécurité de notre pays. L’IHEDN, c’est une pédagogie extrêmement originale, un mélange de gens venant de tous les horizons, de toutes opinions, pour permettre de développer un dialogue enrichissant. Ceux qui le souhaitent peuvent venir participer à une session nationale ou en région. Deuxième élément de la pédagogie, des conférences, des études de groupe, des visites sur le terrain, des débats, un dialogue franc et un rapport avec les propositions.

Pourquoi les auditeurs de l’IHEDN en sont venus à s’occuper de l’armée et du lien entre les armées, au cœur de la Nation et l’Éducation nationale. En 1982, le premier protocole n’a pas donné les résultats escomptés.

Parmi les militaires, il y avait un auditeur qui s’est proposé comme « facilitateur ». On vous propose de venir nous aider à nourrir le dialogue et être le lien continu, car, parmi les hauts responsables la République, ils ne restent que deux, trois ou quatre ans à leur poste. Il n’y a donc pas de continuité. L’avantage des auditeurs et des associations est qu’elles sont pérennes. Ainsi, en 1987, est né le Trinômes académique avec ses trois pieds, ses trois composants.

Nous pouvons, sur l’avenir, apporter quelque chose à propos du Livre blanc de la Défense. Nous pouvons apporter quelque chose à propos du débat citoyen, aider les enseignants à construire et à développer des débats citoyens dans les écoles, dans les classes, sur le Livre Blanc de la Défense. Nous avons réalisé et nous mettons à jour un ouvrage intitulé « 99 questions pour la Défense ». Nous pouvons vous aider à préparer vos fiches pédagogiques et vos cours, dans le cadre du maillage des 32 associations en région.

Développons ces groupes pour travailler, à partir de la suspension du service militaire, sur une réflexion à propos de la création d’un service civique. Vous êtes les bienvenus à l’IHEDN, dans ses sessions. Vous êtes les bienvenus aussi dans les associations. Elles regroupent non seulement des auditeurs et des membres associés, mais tous ceux qui sont sensibilisés par la Défense de notre pays. Merci pour votre attention.

Table ronde

Quelle politique de défense et de sécurité pour l’Europe ?

Thème susceptible de suggérer des pistes lors des interventions des enseignants devant leurs élèves. On essaie depuis des années de créer une défense européenne. Où en est-on aujourd’hui ? Quels sont les obstacles sur lesquelles on bute ? Existe-t-il un budget de recherche, une industrie de défense commune ? Quid par rapport à la notion de souveraineté ? Le principal obstacle ne serait-il pas, comme à l’origine de la construction européenne, la présence des Américains a travers l’OTAN ? Ne peut-on envisager d’étendre, auprès de la jeunesse, la notion de citoyenneté nationale à une citoyenneté européenne ?

Retour d’expérience des Trinôme Paris – Créteil – Versailles

 

1 – Académie de Paris. Gilles Boué. Professeur agrégé au lycée Hélène Boucher à Paris

Élaboration d’un ensemble de fiches au service des enseignants : la Défense nationale en fiches. Résultat d’un travail conjoint du Gouverneur militaire de Paris, de l’inspection pédagogique d’histoire et géographie et du CDRP. Le Trinôme est intervenu d’abord pour l’analyse des besoins, après le constat qu’en matière de questions de Défense, la collecte d’informations, le tri de ces informations, leur mise en œuvre, pose parfois des problèmes aux collèges. L’inspection académique de Paris a été au centre de la coordination de ce travail. Elle a fait intervenir les services du GMP et les services du CRDP, avec le travail de dix auteurs, enseignants en collèges, lycées, lycées professionnels, afin de balayer l’ensemble des problématiques de nos programmes. Le GMP, expert technique, est intervenu pour la relecture des textes proposés et la diffusion de ce produit. Il se présente sous la forme d’un CD-Rom imprimable, d’une trentaine de fiches. Ces fiches sont divisées en deux grands chapitres.

Le premier chapitre comprend 14 fiches : la France doit faire face à des menaces. Intitulé de ces fiches : la diversité des crises, les menaces contre la sécurité dans le monde, les menaces contre les intérêts français à l’étranger, la menace terroriste, les catastrophes naturelles. Chacune de ces fiches correspond à une problématique directement liée à notre enseignement.

Le deuxième chapitre : la France se protège contre ces menaces. Quelles sont les réponses apportées par les institutions de la Défense et de la Sécurité à ces menaces. Les fiches sont structurées à l’aide d’un ensemble de documents, une mise en perspective et une mise en œuvre pédagogique. Toutes les fiches ont une structure identique. Un dossier de documents, une mise en perspective de la question, une mise en œuvre pédagogique, un questionnement pédagogique sur les documents et une bibliographie spécifique ou générale.

Exemple de fiche : menace sur l’approvisionnement énergétique. Le document principal est une carte extraite du magazine Histoire. L’intérêt pour les enseignants est que, les droits ayant été achetés, les documents sont utilisables directement en classe et copiables. Le document principal est complété par d’autres textes, ensuite une présentation de la problématique est générale, les risques encourus par les approvisionnements, les niveaux d’utilisation, par exemple classe de 3° en géographie, classe de 3° en éducation civique, en terminale E et F en Histoire, avec des propositions d’utilisation, soit illustratives, soit, directement, des études de cas plus spécifiques. Ces fiches se veulent en phase avec les préoccupations de la Défense. Elles ont été publiées en 2007. Depuis cette date, la publication du Livre Blanc sur la Défense et la Sécurité nationale a un peu modifié les problématiques. De même l’actualité, comme le développement de la piraterie dans l’Océan Indien pose de nouvelles questions. Dans ce tableau, on voit l’évolution du type des menaces, telles qu’elles figurent dans le Livre Blanc. On se rend compte que les fiches avaient prévu l’évolution générale et qu’elles correspondent totalement à ces nouvelles problématiques et sont directement utilisables.

Quel est le devenir de ces fiches ? C’est un produit qui reste ouvert, les fiches sont complétées régulièrement. Elles vont être publiées sur le site pédagogique d’histoire, de géographie, d’éducation civique de l’académie de Paris. Et, dès maintenant, de nouvelles fiches sont en chantier : une sur le Livre Blanc de la Défense et la Sécurité nationale et une autre sur les nouvelles menaces dans l’Océan Indien. Voilà un exemple de travail fourni par le Trinôme de l’académie de Paris.

2 – Académie de Créteil. Raphaëlle Lorente. Professeur d’histoire et géographie au lycée Jacques Brel à La Courneuve

Présentation des travaux personnels, encadrés, d’élèves, dans le cadre du Concours national de la Résistance et de la Déportation. L’an dernier, le thème du concours était « L’aide apportée aux personnes persécutées, pourchassées, en France pendant la seconde guerre mondiale », une forme de Résistance.

Ce travail a été préparé, lors de séances du CPE, avec le professeur de sciences économiques et sociales et le professeur d’histoire et géographie. Les élèves ont été très enthousiastes pour ce sujet et ils ont été primés par le Concours national de la Résistance en juin 2008. D’abord, la démarche d’organisation : il a fallu compenser le fait que le cours sur la seconde guerre mondiale en classe de 1° a lieu à la fin de l’année, alors que le projet devait débuter dès le début de l’année. Donc, nous avons commencé par un cours sur la seconde guerre mondiale, pour que les élèves connaissent le contexte. Ensuite, il a fallu sensibiliser les élèves aux différents aspects du thème du concours, l’aide aux personnes persécutées, pourchassés. D’abord, nous avons visité le Mémorial de la Shoa, avec une sensibilisation sur le thème des Justes et des enfants à cacher, première idée du thème.

Puis dans un second temps, un professeur d’histoire et géographie du lycée a présenté l’aide aux prisonniers de guerre pendant la seconde guerre mondiale. À partir de ces éléments, les élèves avaient des pistes de réflexion afin de pouvoir choisir leur sujet. Ensuite, les élèves ont commencé à choisir leur sujet et ont entrepris leurs recherches bibliographiques. Beaucoup d’élèves ont travaillé sur le thème du sauvetage des enfants juifs et se sont attachés à des personnes qui ont aidé les enfants à se cacher et, en même temps, on les a incités à découvrir les valeurs qu’il défendait en sauvant les enfants et les risques qu’ils encouraient avec ces actions quotidiennes, en cachant les enfants, soit chez eux, soit dans une commune. Les élèves ont beaucoup travaillé sur la Maison de Sèvres et la commune d’Izieu. Certains se sont arrêtés sur le personnage de Georges Granger qui a fait passer plus de 1 000 enfants en Suisse, avec le risque de passer une frontière pendant la guerre. D’autres groupes ont travaillé sur l’aide apportée aux prisonniers de guerre par Sœur Hélène et (?) qui ont aidé des prisonniers de guerre à passer en zone libre. Un dernier groupe a travaillé sur l’aide apportée aux personnes persécutées et pourchassés dans le département de Seine Saint-Denis où se trouve le lycée. Cette deuxième étape a consisté à regrouper toutes les idées sur le sujet.

La troisième étape a consisté à produire un travail pour les TPE et un travail à présenter au Concours de la Résistance et de la Déportation.

Avant de vous présenter les travaux, je vais vous présenter les acteurs du projet, les 23 élèves qui se sont passionnés pour le sujet et qui ont passé beaucoup de temps à rechercher des informations, au CDI et à la Fondation de la Résistance, en utilisant des ouvrages spécialisés pour rencontrer des témoins de la Résistance. Ils ont rencontré Georges Granger à deux reprises et, à la suite de leurs entretiens, ils ont écrit un livre pour témoigner de leurs rencontres. Ensuite, ils ont rencontré une ancienne enfant caché à Sèvres. Elle est venue au lycée pour apporter son témoignage à l’ensemble de la classe. Les élèves ont ensuite rencontré d’autres témoins, d’anciennes enfants cachées. Les élèves ont beaucoup apprécié ces rencontres avec ces témoins, afin de confronter l’expérience réelle à ce qu’ils avaient trouvé dans les livres. Ils ont aussi cherché sur Internet, dans les pages blanches, des noms qu’ils avaient trouvés dans les listes et, en même temps, ils se sont déplacés pour visiter une exposition à Paris sur le réseau Marcel qui avait aidé à cacher des enfants à Nice. Et là, ils ont rencontré sept personnes à deux reprises. Ces rencontres ont été enrichissantes pour les élèves, car ils ont à la fois pris conscience du rôle qui est le leur en ce qui concerne la mémoire de la seconde guerre mondiale et, en même temps, les témoins les ont responsabilisés, à chaque fois, sur le rôle qu’ils avaient en tant que citoyens, à transmettre cette mémoire de la seconde guerre mondiale. La Fondation de la Résistance doit être remerciée pour avoir accueilli à plusieurs reprises les élèves pour leurs recherches, pour les avoir mis en contact avec les témoins. Nous remercions aussi la Direction de la Mémoire, du Patrimoine et des Archives (DMPA), qui nous a aidé à financer un voyage en Normandie pour visiter le Mémorial de Caen où devait avait lieu, à ce moment, une exposition sur Les Justes et visiter, en même temps, les plages du débarquement et le Musée de la Bataille de Normandie.

Je peux vous montrer plus concrètement les travaux des élèves. Les productions ont été variées et originales, des journaux, des vidéos, des scénarii, où les élèves s’attribuaient des rôles pour les jouer. Exemple, sur la Maison de Sèvres, un journal de la Résistance, avec la mise en place du contexte de leur sujet, l’action de la direction de la Maison de Sèvres qui cachait des enfants et fabriquait de faux papiers pour que les enfants ne soient pas persécutés.

En quoi ces faux papiers sont-ils une forme d’aide ? Une page sur le témoignage d’une enfant cachée, avec les questions posées et les réponses. La dernière page est consacrée à un hommage aux Justes et la plaque commémorative de la Maison de Sèvres aujourd’hui détruite. Une autre production des élèves concerne la maison d’Izieu, en se mettant à la place d’une petite fille qui se cachait dans la maison, à travers les lettres qu’elle écrivait à sa tante. Elle décrivait la vie quotidienne, son arrivée, ses conditions de vie, l’attente de nouvelles de ses parents, l’arrivée d’autres enfants. Dans les dernières lettres, elle n’a plus de nouvelles de sa tante et elle s’inquiète. Troisième exemple, un script, rédigé par des élèves de Seine Saint-Denis, à propos d’aviateurs anglais pourchassés, en se basant sur les archives départementales de Bobigny. Ils ont pu imaginer une émission de télévision dans laquelle l’historien qui travaillait sur l’aide aux personnes pourchassées était interviewé. Lors du passage en TPE, ils ont été filmés pour réaliser leur production finale. À cette occasion, les élèves se sont montrés très enthousiastes et ont beaucoup travaillé pour réaliser des productions originales, en étant très touchés par leurs rencontres avec les témoins.

3 – Académie de Versailles. Madame Donohue-Weil. Principale du collège La Paix d’Issy-les-Moulineaux

Appelé Le Collège de la Paix, il a une responsabilité morale à exercer, d’autant plus qu’il est situé à Issy-les-Moulineaux, adossé au fort. La ville a beaucoup d’actions. Elle a été une des premières villes marraines en partenariat avec le CMT Andromède, depuis 23 ans. D’autres unités filleules se sont rajoutées comme l’Escadron des hélicoptères de Villeparisis, le Régiment de Marche du Tchad, le 2° Régiment d’infanterie de la Garde Républicaine. Tous les établissements de la ville d’Issy-les-Moulineaux ont des participations à des parrainages. Nous travaillons la liaison CM2-6°, avec des actions telles qu’il y ait une continuité. Le travail ne se fait pas uniquement en classe de 3°. Il s’articule tout au long des quatre années du collège.

Lier le projet d’établissement à l’éducation à la citoyenneté, revient à définir correctement le mot citoyenneté, mot que l’on retrouve partout. On va essayer de constituer un porte-folio qui va représenter une mémoire des actions pour chaque élève, sachant que les actions se font dans les classes, que les classes sont brassés et qu’il faut garder une mémoire de ce que chaque élève fait au cours de sa scolarité dans le collège. Il y a des résistances, elles sont légitimes, car on s’appuie beaucoup sur les professeurs de sciences humaines. Ils ont un programme à couvrir et cela procède d’une vision commune, pour faire en sorte que les élèves aient leur temps de cours et que l’on puisse quand même mener à bien ces actions. Cette vision commune, on ne peut pas en faire l’économie, parce que, enseigner la Défense et une culture de la paix, ce n’est pas évident pour tout le monde. Il faut établir des ponts, passer beaucoup de temps à s’écouter les uns, les autres. Les instructions officielles sont claires, on peut toujours y recourir. Un chef d’établissement doit convaincre au lieu d’imposer. Il est bien, de temps en temps, de montrer que l’on connaît les textes et les programmes. Mais il vaut mieux essayer de faciliter les initiatives de chacun de nos collègues. Intégrer les parents dans le processus est vital. C’est important, car un certain nombre de documents, comme l’attestation de sécurité routière ou l’attestation de participation à la JAPD, sont des documents officiels dont les enfants ont besoin pour passer leur permis de conduire ou le bac. Et les parents n’ont pas toujours conscience de cela, puisqu’ils laissent les documents à l’enfant qui les garde dans sa chambre. Donc, on fait un porte-folio. C’est une mémoire, ce sera un souvenir. On va l’alimenter avec des photos, des documents officiels qui seront là. On leur donnera d’abord une copie et, à la fin de scolarité, l’ensemble dans ce porte-folio.

Proposer une offre diversifiée : voici quelques exemples. En 6°, on propose deux heures par classe avec l’officier de Prévention sur les questions de langage, les mots qui fâchent, que dire, à qui se confier, comment agir si l’on est témoin de certaines choses, il faut dénoncer la loi du silence. Nous faisons un travail d’animation avec des interventions du groupe Léo Lagrange. Le groupe Démocratie et Courage en Île-de-France intervient gratuitement. Ils ont organisé une sorte de scène de théâtre et dialoguent avec les enfants.

Il y a ensuite la journée des délégués. Les délégués ont une carte, ainsi que les suppléants, car ils ont été élus : c’est déjà un premier processus de citoyenneté et c’est un engagement personnel. La classe est prise en charge et bénéficie de deux heures par semaine dans le cadre de la formation à la citoyenneté. Ce qui veut dire que lorsque l’on construit les emplois du temps, il faut prévoir les créneaux pour ne pas faire sauter d’heures. Les élèves participent également au Conseil de la ville et nous avons une classe qui est pilotée par la ville pour aider les enfants en difficulté scolaire. Les élèves ont deux heures par semaine pour apprendre à prendre la parole, à devenir des ambassadeurs auprès des autres de leurs camarades de 6°. Ils sont formés à prendre confiance en eux et participent à ce titre à toutes les actions de la ville concernant la citoyenneté. En 5°, nous avons à peu près la même structure, avec un travail supplémentaire sur la Protection civile. En 4°, on met en place le partenariat qui se trouve en réemploi en année de 3°. En 3°, nous avons des stages en entreprise avec le plaisir de voir des élèves qui partent sur les bases militaires qui sont visitées en 4°. Ils peuvent y retourner pendant une semaine. Nous participons au Ravivage de la Flamme à l’Arc de Triomphe. Ce sont des participants volontaires et j’insiste sur cette démarche de volontariat. C’est important de compter sur un engagement personnel des élèves, qui ne soit pas simplement une activité dans le cadre de l’école. Les JAPD ont eu lieu cette année dans le cadre du 11 novembre. Nous avons fourni le nombre des élèves ayant plus de 16 ans afin d’organiser une action personnalisée. Cela a été efficace, puisque plus de 140 élèves ont répondu à l’appel et nous avons eu la chance de pouvoir organiser cette journée dans la ville même. Nous sommes en partenariat avec le 2° Régiment de la Garde Républicaine, caserne Kellermann, le C MT Andromède, l’Escadron d’hélicoptères de la base aérienne 107 basée à Villeparisis et à Villacoublay. Le schéma est classique. On profite des commémorations et du passage des unités filleules qui viennent dans la ville pour demander à ce qu’il y ait une présentation dans la classe. Les quatre classes de 4° participent à ce partenariat. La présentation se fait avec un programme PowerPoint et on répond aux questions des élèves. À l’expérience, les élèves en difficulté scolaire sont très curieux, posent beaucoup de questions, s’intéressent au sujet. C’est un temps d’échange.

Visite des casernes : c’est un projet d’établissement, mais il faut varier pour ne pas tomber dans la routine. On alterne parmi les nombreuses casernes qui se trouvent dans Paris. Il y a celles comme la Garde Républicaine qui ont leurs spécificités, comme la caserne Kellermann, où les élèves se sont entraînés sur un mur d’escalade et qui ont suivi la journée d’un gendarme. Visite des Palais nationaux, l’Assemblée nationale, le Sénat, le Luxembourg, en une après-midi. Lors de la visite des casernes, les élèves découvrent des métiers, parlent avec des personnes qui ont la mémoire du geste, de l’artisanat, du travail de grande qualité, aptes à revaloriser les métiers. Au Palais de Justice, nous avons la chance d’avoir des magistrats qui jouent le jeu et mettent les élèves en situation, très concrètement. Pour l’Andromède, il y a d’abord une présentation dans la classe avec une équipe, pas seulement le commandant et son second, mais il y a aussi le cuistot, le plongeur, celui qui fait l’analyse du repérage des mines et des échanges avec les professeurs de la classe et le bateau, car celui-ci a des missions et on ne peut communiquer que par informatique. Le grand moment, c’est le passage sur le bateau d’une durée de deux jours. Les élèves passent une nuit à Brest et passent le dimanche de façon conviviale (barbecue). Les personnes qui encadrent représentant l’ensemble de la communauté scolaire et pas seulement les professeurs d’histoire et géographie ou d’éducation civique. Pour animer ces deux journées, il y a un jeu : on groupe des élèves de la classe en équipes qui doivent trouver les réponses à des questions, en regardant et en posant des questions au personnel et aux marins. Cela favorise les échanges et les contacts.

Nous participons aussi au travail de mémoire. Différentes personnes viennent dans l’établissement pour témoigner, comme Simone Veil, Lucie Aubrac, etc. Toutes les participations sont basées sur le volontariat, la participation des élèves aux commémorations, notamment. Et nous sommes rarement déçus. Élèves comme professeurs, c’est la meilleure évaluation que nous pouvons faire de notre travail et qui donne un sens à notre engagement.

Favoriser les initiatives, tel est le dernier volet de l’action pour ne pas tomber dans une routine. Il faut du changement et cela dans le cadre de l’engagement des élèves. Pour cela, nous avons créé des clubs de maquettes, de jeux de stratégie en réseau, etc. Il y a aussi un mode de réparation, un travail d’intérêt général pour apprendre à se rendre utile et non pas parce qu’ils ont été punis. C’est un peu difficile à faire comprendre. C’est un temps de convivialité et mis dans le porte-folio du citoyen. Nous lançons une entreprise de 50 heures de travail bénévole dans la liaison entre générations, en allant dans les maisons de retraite, au devant des plus défavorisés, des plus isolés et cela volontairement. C’est cela qui, peut-être, peut changer les choses. Pour résumer, il faut chaque année rediscuter, varier les équipes, voir ce qui marche, ce qui ne marche pas. Et il faut de la cohérence, faire sens pour les enfants. La retenue du mercredi, pour les élèves qui n’ont pas fait leur travail, est encadrée par des surveillants d’éducation. Ils copient une page et en discutent avec les surveillants. Tous les établissements publics et privés de la ville d’Issy-les-Moulineaux apprennent le chinois. Cette année, nous avons mis en place un forum pour examiner si nous avons la même conscience de la paix, de la sagesse, de la guerre, en Europe et ailleurs. Le travail avec le professeur de chinois porte sur les 36 stratagèmes de l’art de la guerre, avec des élèves volontaires. Chaque stratagème tient sur moins d’une page et, à partir de là, il y a une réflexion sur le pourquoi de la situation et les éventuels équivalents de proverbes en France. En tant que chef d’établissement, nous sommes les incitateurs de tout cela.

Questions de la salle

Q : Y a-t-il un jumelage avec un établissement allemand qui a le même type d’énergie éducative ?

R : Certes, qui dit enseignement, dit énergie ! Tous mes collègues font preuve d’énergie, sinon ça ne marche pas. Dans la ville, il y a des jumelages avec l’Allemagne, comme Wengen, un jumelage qui avait commencé en 1948. C’est intéressant, car dans le projet d’établissement, tout élève partira au moins une fois en voyage en Europe. Il faut, avec la pratique des langues, ouvrir la vision de la paix qui ne se réduise pas à un état de non guerre, mais doit aussi être également perçu comme une complémentarité. Comprendre que l’on a besoin de l’autre et que l’autre a besoin de nous, en s’appuyant sur des liens d’amitié. La ville a aussi un jumelage avec l’Angleterre et des échanges avec trois établissements d’enseignement. Et aussi en Italie. L’UNESCO nous propose un voyage en Chine.

Q : Puisque les conflits sont inévitables, peut-on préférer parler de pédagogie de non-violence, au lieu de parler de paix, mot qui n’est pas très motivant ?

R : C’est juste. La pédagogie de non-violence est mise en place dans les actions de Prévention. La violence n’est qu’un pis-aller par rapport à un idéal. Les jeunes du collège ont besoin d’idéaux. Certes, dans mon bureau, je reçois des élèves qui sont en conflit, qui se sont battus, qui sont renvoyés de cours. Mais, à partir du moment où l’on parle avec des symboles forts, on leur parle de justice… On fait en sorte qu’ils ne retournent pas leur colère contre l’institution, mais que celle-ci est là d’abord pour les servir. On leur demande de faire une part du chemin et, pour cela, on peut employer tous les mots, tous les aspects de la réalité.

Clôture de la journée par M. le Préfet

Le 30 mai dernier à l’institut de France, M. Xavier Darcos, ministre de l’Éducation nationale, annonçait cette journée anniversaire des Trinômes. Passant des paroles aux actes, le ministre a rappelé aux recteurs, en octobre dernier, lors de la réunion mensuelle, l’importance qu’il attachait à leurs actions et leur demandait de faciliter la présence des enseignements aux actions du Trinôme. Plus modestement, en allant dans les régions pour préparer des sessions de Missions locales, nous rendons visite, non seulement aux Préfets, mais aussi aux recteurs, pour leur parler de cette action, pour aider les présidents d’associations. Certains sont déjà bien introduits, mais lorsque ce sont de nouveaux présidents, il faut refaire le travail de prise de contact avec les recteurs, de façon que la dynamique s’enchaîne bien.

Cette année nous sommes réunis pour ce 20e anniversaire dans cet amphithéâtre prestigieux, avec des personnalités prestigieuses, acteurs et membres actifs de la diffusion du lien Armée/Nation, dans lequel l’Institut a lui-même sa place. Et, par son action, il soutient ce que font les associations.

Dans le chapitre 18 du Livre Blanc, adhésion de la Nation « la confiance dans l’action des pouvoirs publics vient alors au premier rang, l’information doit être précédée d’un travail régulier de sensibilisation et de formation de l’opinion, à une meilleure connaissance des données de la Défense et de la Sécurité, pour rendre le citoyen apte à évaluer l’événement, lorsqu’il se produit et à le mettre en perspective ».

C’est presque une définition de la mission de l’Institut vis-à-vis des cadres de la Nation, vis-à-vis des jeunes, vis-à-vis des différentes cultures. Mais, au milieu de ce chapitre sur le lien, on parle de la formation des jeunes aux enjeux de la Défense et de la Citoyenneté. Ils reposent sur différents moyens et en particulier l’enseignement de la Défense en classe de 3° et de première1°. Il y a une volonté exprimée clairement dans le Livre Blanc, d’améliorer les choses, qui constate que cet enseignement est inégalement dispensé et qu’il convient de renforcer les efforts.

Le fait que vous soyez présent ici montre que nous sommes sur le bon chemin. L’IHEDN essaie de jouer ce rôle, de façon complémentaire à celui des autres acteurs, dans nos différentes sessions. Nous essayons d’attirer des enseignants et, plus concrètement, lors des sessions en région, il y en a quatre par an et une en région parisienne, tous les deux ans. Sur 72 personnes, on essaie chaque fois d’avoir une bonne dizaine d’enseignants du secondaire. Cela permet ensuite de rayonner dans tous les établissements. Ensuite, les associations qui recrutent des auditeurs sortis de session, ayant des enseignants parmi leurs membres, sont d’autant plus aptes à mener une action efficace.

Nous avons aussi une sensibilisation au niveau des sessions jeunes, puisque nous accueillons des séminaires de jeunes pendant une semaine, des jeunes qui sont, soit étudiants, soit dans la vie active, parmi lesquels il y a des enseignants ou de futurs enseignants.

Nous avons actuellement un séminaire assez original qui se déroule actuellement et qui s’intitule « La cohésion nationale et la citoyenneté ». Une trentaine de personnes, plutôt jeunes, sont des relais, à un niveau ou à un autre, dans la vie des quartiers d’Île-de-France. Certains sont des professeurs, des étudiants en IUFM, il y a des présidents d’association, des élus locaux, des chefs d’entreprise, des créateurs d’entreprise dans ces quartiers. Nous voyons avec eux comment la cohésion sociale, un préalable à l’esprit de Défense, peut être développée dans une population qui a d’autres préoccupations et pour qui ces questions apparaissent fort éloignée des problèmes d’emploi ou d’intégration. Nous avons à chaque fois un débat sur l’éducation, comment peut-elle être à la fois un outil pour l’esprit de Défense et aussi un outil d’intégration. Et puis, nous avons un projet, grâce à M. Barrot, avec le directeur de l’école des cadres de l’éducation, l’ESEM, là où on pourra, en deux jours, proposer une formation particulière pour le futur chef d’établissement et le sensibiliser à ces questions.

Nous ne pouvons que nous réjouir des actions qui sont menées par toutes les associations et particulièrement en Île-de-France, où il existe des associations puissantes avec beaucoup de besoins, puisque le nombre des enseignants à sensibiliser est plus important qu’ailleurs.

Sachez que l’Institut, avec sa mission de rassembler et de discuter des crédits en amont, nous avons un chargé de mission auprès du président Savelli pour ces questions, nous ne pouvons que vous encourager à continuer et vous féliciter pour la tenue de cette importante manifestation.

Merci à tous.


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