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La guerre d’Algérie n’aura pas lieu !

L’explosion des inégalités dans les pays de l’Union européenne, sur fond de croissance faible ou nulle, un endettement public insupportable, un phénomène de polarisation dans lequel les riches deviennent toujours plus riches et les pauvres toujours plus nombreux, une population de jeunes au chômage ou entraînés dans des emplois de services peu qualifiés et mal payés, des classes moyennes qui se sentent menacées et qui cherchent des boucs émissaires, émeutes, guerres civiles, l’engrenage de la violence…, ce funeste enchaînement ne vous rappelle rien ?

 « Un peuple qui oublie son passé, se condamne à le revivre ».

En 1935, Jean Giraudoux publiait « La guerre de Troie n’aura pas lieu !«  Avec lucidité, l’auteur voulait dénoncer la passivité de l’opinion publique et le cynisme des hommes politiques qui voyaient venir la guerre, mais ne faisaient rien de courageux pour l’éviter. Sa pièce de théâtre voulait être un avertissement devant la montée du fascisme et du totalitarisme sur fond de crise économique.

Cette année-là aussi, une chanson obtenait un succès phénoménal, qui se prolonge encore aujourd’hui. Intitulée « Tout va très bien, Madame la Marquise ! », son ironie féroce la faisait fredonner par des Français inquiets de la tournure des événements, inquiets, mais lucides, à l’image de son interprète, à l’époque de sa création, Raymond Ventura, qui était juif.

Et aujourd’hui ? Faut-il écrire « La guerre d’Algérie n’aura pas lieu ! »? En France, le taux de chômage atteint des sommets, sur fond de crise financière, économique et sociale. L’absence de croissance a pour conséquence d’exacerber la fracture sociale, l’individualisme, le communautarisme, la montée d’un « populisme » inquiétant dans la perspective d’échéances électorales importantes. Pour éviter de revivre de nouvelles pages d’une histoire tragique, violente, dont les émeutes urbaines de 2005 ont constitué une préfiguration, mieux vaut mobiliser ceux qui veulent agir. Cette référence à la question d’Algérie est-elle pertinente ? Sans doute, parce que les difficultés actuelles sont la conséquence « d’événements » qui ressemblent à ceux qui ont abouti à une page tragique de l’histoire de France : la chute d’une République, la naissance d’une autre, l’exode des pieds-noirs, les nombreuses victimes du « maintien de l’ordre« , une guerre civile franco-française et algéro-algérienne.

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La citoyenneté aujourd’hui

Cette conférence à été prononcée le 6 octobre 2011 par Malika Sorel, membre du Haut Conseil à l’Intégration, au cours de la Journée de formation des R L J C, organisée à l’École militaire par la Commission Armées-jeunesse.

Le travail d’engagement sur la citoyenneté doit être accompli chaque jour par les citoyens. C’est fondamental et puisque la situation est difficile, comme vous le savez, il convient de tenir un langage de vérité.

La plupart des difficultés que nous rencontrons aujourd’hui chez les jeunes, quant à leur éducation à l’école ou leur place dans la société, vient du fait que nous leur  avons caché un certain nombre de vérités. Cela les a desservis dans leur  parcours, dans leur évolution. Situation particulièrement dramatique pour des enfants dont la culture est d’origine non européenne. Ils ont des difficultés  pour comprendre ce que la société attend d’eux. Je montrerai ce qu’il convient de faire, ou de ne pas faire sur le terrain, pour éviter d’enfermer certains jeunes dans leurs origines culturelles, ce qui va freiner leur insertion dans la société. Il y a un certain nombre de concepts à définir car nous sommes dans un grand flou. Il est important de savoir quels sont les mots qui sont employés, à quoi ils correspondent. Car lorsque nous devons travailler avec des personnes non européennes, elles ne placent pas nécessairement le même contenu sur les mêmes mots. Lorsque nous regardons les autres avec une grille, avec une vision européenne, nous avons toutes les chances de nous tromper. Il faut connaître l’envers du décor, savoir à qui nous avons affaire, non pas pour abonder dans leur sens, mais comme pour les militaires, la connaissance du terrain n’oblige pas à se plier à ce que ceux qui se trouvent en face, veulent de nous.

Dans le thème proposé pour cette intervention, je retiens le terme « aujourd’hui » : la citoyenneté aujourd’hui. Comme si cette citoyenneté avait changé, comme s’il y avait une citoyenneté binaire et qu’à un certain moment il y aurait eu une rupture, une discontinuité. Il faudrait alors dater la citoyenneté d’aujourd’hui par rapport à un « hier« . Qu’était-ce que la citoyenneté hier ?

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